Wargame solo : les jeux « Five from »

Le wargame en solo ou en coopération est une autre façon d’utiliser nos chères figurines et décors. Il existe de plus en plus de règles qui proposent ce mode de jeu, je vous présente ma favorite du moment : la série des « 5 from » d’Ivan Sorensen (Nordic Weasel Games)

Pour moi, il n’y a rien de tel qu’une partie de wargame pendant une chaude soirée d’été ou une longue après-midi d’hivers. Oui mais, que faire quand il n’y a personne de disponible et que l’envie de pousser la figurine vous démange ? Comment utiliser ces figurines qui prennent la poussière parce que plus personne n’y joue ? Le wargame solo est peut-être la réponse …

Peut-être que vous avez quelqu’un avec qui jouer mais cette personne n’y connaît rien aux wargames ? Si l’aspect tactique n’est pas un attrait suffisant ou bien les règles sont trop complexes, proposez une partie en coopération !

Un genre un peu différent

Si vous êtes adepte des Jeux de Rôles, vous avez sans doute remarqué l’essor des JdR « solo » ces dernières années. C’est également le cas pour de plus en plus de jeux de société. Le wargame n’est pas en reste dans le domaine, même si le mode solo y est plus discret. Mes préférés sont ceux de la gamme que j’appellerai « 5 from » par Ivan Sorensen.

Ces jeux font partie de ceux qu’on appelle en anglais « miniature agnostic ». Ce qui veut dire qu’il n’y a pas de gamme de figurines associée et que vous pouvez utiliser celles que vous voulez ! Presque n’importe quelles figurines feront l’affaire, même s’il vaut mieux garder la même échelle de taille. Vous n’avez pas les gobelins demandés par le scénario ? Utilisez des robots à la place ! Si ça ne vous dérange pas, ça ne gênera personne !

Tous les jeux de cette gamme ont la même base. Vous commencez par créer votre équipe d’une demi-douzaine de personnages grâce à quelques jets de dés. Ce sont eux dont vous suivrez les aventures tout au long d’une série de missions. Ce sont également des tables aléatoires qui génèrent les détails de ces missions. Si votre équipe atteint les objectifs fixés, elle empochera la récompense de mission et peut-être même quelques extras déterminés par … plus de tables aléatoires !

Autant vous le dire tout de suite, il y a beaucoup, beaucoup, BEAUCOUP de tables aléatoires dans la gestion du jeu. Car c’est de cet élément qu’il tire tout son sel. Si cela vous rebute, je vous déconseille cette gamme de jeux. Dans le cas contraire, vous embarquerez dans une aventure épique comme peu de wargames peuvent vous fournir.

Comment ça se passe ?

Plongeons un peu dans les entrailles du système. On a deux grandes phases : l’affrontement sur la table et la gestion de la campagne.

La phase de bataille

Tout comme un wargame habituel, deux camps s’affrontent. La différence est que les figurines d’un des deux auront un comportement prédéfini. Les adversaires suivront donc un « script » assez simple pour définir leurs priorités selon leur nature et situation. Une bête enragée foncera droit vers l’ennemi le plus proche, un soldat aguerri profitera sans doute du décor pour rester à couvert, et un tireur cherchera à trouver la meilleure ligne de tir.

Le système d’initiative est un élément primordial de la stratégie. À chaque tour, vous lancez quelques dés pour déterminer lesquels de vos héros pourront agir avant l’adversaire. Plus un personnage est rapide, plus il a de chance de s’activer en début de tour. Les autres devront attendre que l’ennemi ait joué avant d’effectuer leurs actions. Simple, mais efficace !

Les règles sont assez simples et expéditives. Les oppositions se résolvent par un jet d’un ou deux D6 auquel on ajoute le score de combat. Si l’attaque réussit, la figurine a la possibilité de blesser son adversaire (encore un jet d’un D6). Une figurine blessée est éliminée (ou perd un point de vie pour les gros monstres), ou seulement étourdie si le jet pour blesser est un échec. Une figurine se rétablit de son étourdissement à son activation. Étourdir une figurine une seconde fois avant d’elle ne s’active l’élimine.

Bien entendu, l’équipement joue un rôle. Différentes armes apportent différents bonus (ou malus). Et nombre d’objets sont à usage unique, réfléchissez bien avant de les utiliser !

Une rencontre ne prend pas beaucoup de place sur la table. Un espace de 90x90cm est idéal, et souvent 60x60cm suffira. Un minimum de décors est requis, par exemple pour y placer des objectifs, mais une dizaine d’éléments est en général suffisant.

Léger pour un wargame, me direz-vous. Peut-être, mais c’est que l’affrontement n’est qu’une part du jeu. Le vrai moteur, ce qui me fait revenir encore et encore à ces wargames, c’est la campagne.

La phase de campagne

Votre troupe n’est pas seulement recrutée pour le scénario, vous suivez leurs aventures sur le long terme. Ils sont devenus les personnages principaux de votre épopée personnelle, votre bande de héros que vous allez mener de simples aventuriers sans le sou à des héros de légende aux exploits épiques.

Du moins, pour ceux qui auront survécu. Comme dans toute campagne qui se respecte, la disparition d’un de vos héros sera irréversible. Et cela va rapidement influencer la façon de mener les combats. Oui, vous avez besoin de la récompense qu’offre ce job si votre équipe le réussi… mais est-ce que cela vaut le coup de risquer la vie de ce compagnon fidèle dans lequel vous avez tant investi depuis des semaines ? Heureusement, la plupart du temps un héros éliminé en combat ne sera que blessé. Mais cela signifie qu’il sera indisponible pour quelques missions, le temps qu’il guérisse.

Chaque tour de campagne est sujet à de nombreux jets de dés pour générer événements aléatoires, opportunités et ennemis à combattre. Et c’est donc là qu’on retrouve nos chères tables aléatoires ! Vous ne saurez souvent pas à quoi vous attendre. Vous allez décider où la bande voyage, gérer l’équipement et tenter de trouver un job. On déterminé ces jobs par quelques jets de plus pour définir l’objectif, la récompense et l’adversaire à affronter. Cela pourra être les gardiens du lieu, des pillards en maraude, une bande rivale, etc. Le job est alors résolu sur la table de jeu en tant que bataille, sortez les décors !

Une épopée dont vous êtes les héros

Au fil de la campagne, vous aurez également à gérer des objectifs à long terme. Ces quêtes demanderont plusieurs jobs et/ou voyages pour les résoudre. Et chaque job que votre bande entreprend permettra à vos personnages d’évoluer. Ils gagneront ainsi petit à petit en puissance au fur et à mesure des combats.

La campagne a toujours un contexte, un cadre dans lequel elle évolue. Par exemple, dans « 5 Leagues from the Borderlands » (la version fantasy) vous créez une carte de la région à explorer et 3 Grandes Menaces à contrer. Celles-ci sont déterminées à la mise en place de la campagne. Combattez vous une horde de morts-vivants, une armée de sauvages envahisseurs ou un insidieux culte qui ronge le royaume de l’intérieur ? Vous gagnez la campagne si vous éliminez toutes les Menaces.

Dans la version science-fiction (« 5 Parsecs from Home »), vos héros forment un équipage qui a fait l’acquisition d’un vaisseau mais qui doit encore finir de le payer ! Les gens qui vous donneront du travail ne sont pas tous des enfants de cœur, se les mettre à dos pourrait être une épine dans le pied pendant longtemps. Pour tout arranger, il y a une invasion d’aliens en cours dans la galaxie ! Pas de fin de campagne prédéfinie dans cet univers, vous êtes libre de déterminer quand se termine l’histoire de votre équipage. La fin d’un rival qui vous nargue depuis les premiers tours de la campagne ? Ou cette quête particulièrement difficile que vous pouvez enfin terminer ? Ce sont de très bons choix pour mettre un terme à vos aventure… jusqu’à une « saison 2 » ?

Un Wargame ou un Jeu de Rôle ?

Une campagne de « 5 from » mêle de nombreux aspect de jeu de rôle aux éléments d’un wargame classique. De l’évolution des personnages aux objectifs à long terme, en passant par la gestion de l’équipement, tous ces éléments sont souvent inconnus des wargames. Mais les personnages de « 5 from » ne sont pas aussi détaillés que dans la majorité des JdR. Leur fiche individuelle est bien plus proche de ce que l’on voit dans des jeux d’escarmouche.

Finalement les jeux « 5 from » sont un wargame et un jeu de rôle, mais ce deuxième aspect n’est présent que pour servir le concept de campagne. Bien entendu, libre à vous de vous investir pleinement dans cet élément du jeu et d’imaginer le passé, les motivations, les dialogues et petites scènes correspondant aux événements aléatoires que la campagne vous proposera. Vous serez surpris du nombre de fois où un résultat aléatoire trouvera du sens dans l’imaginaire que vous aurez créé au fil des tours de campagne.

Le multivers « 5 from »

Je vous ai jusqu’ici surtout parlé des versions Fantasy et Science-Fiction. C’est parce que ce sont celles que je connais le mieux. Mais il existe d’autres titres écrits par le même auteur qui partagent les mêmes gênes. Chaque version apporte de légères différences au niveau de la mécanique de combat et de campagne pour mieux coller au thème. Je vous fais ici une petite présentation de chacun des univers que je connais dans cette gamme :

Five Leagues from the Borderlands

La version Fantasy du jeu et une des plus connues. Votre groupe d’aventuriers est chargé de ramener l’ordre dans une région reculée du royaume contre ses menaces grandissantes. Vous voyagez sur une carte de la région que vous remplissez au fil du jeu quand vous découvrez des donjons, campements secrets, ruines à explorer et tanières de redoutables monstres. Et c’est sans compter les rencontres aléatoires pendant les voyages.

La magie est rare mais puissante dans ce monde. Les combats se passent surtout au corps à corps, avec des règles un peu plus étoffées que dans les autres univers de la gamme. Vous ne pourrez effectuer qu’un nombre d’action fort limité en ‘mode campagne’(2 par tour pour tout le groupe). Choisissez judicieusement. Parfois la meilleure option sera de ne pas partir à l’aventure ce tour-ci…

On est dans de l’heroic fantasy pur jus. La trilogie Le Seigneur des Anneaux est sans doute la meilleure comparaison cinématographique.

Five Parsecs from Home

Dans une galaxie où humains et extra-terrestres vivent ensemble, votre équipage écumera les planètes et devra remplir des missions souvent illégales pour le compte de puissants cartels ou corporations. Il y a un côté très cyberpunk dans l’espace. Quand vous avez accumulé trop de rivaux sur une planète, il sera temps d’aller voir si les billets ne sont pas plus verts ailleurs. Mais certains rivaux sont tenaces et ont le bras long, ils pourraient vous traquer ! Certaines planètes sont moins permissives que d’autres en ce qui concerne le mercenariat. Et vous ne serez jamais à l’abri d’une invasion alien qui pourra vous forcez à partir plus tôt que prévu.

Dans cet univers on est loin de Star Wars (sauf peut-être du film Solo, coïncidence ?), et on est plus proche des séries Firefly ou Killjoys. L’aspect cyberpunk de l’univers permet facilement d’en faire un pur produit du genre avec quelques petits ajustements.

Il existe un wargame standalone dérivé de cet univers : « Five Parsecs from Home Tactics ». Vous pouvez y jouer comme un jeu séparé en solo, en coopération ou en opposition classique. Mais vous avez également l’option de l’inclure dans votre campagne, permettant des batailles plus larges.

Five Clicks from the Zone

Un univers postapocalyptique où votre bande de survivants ont établi un refuge dans une terre désolée. Cette base, en plus d’être le havre de paix de votre équipe, pourra être améliorée pour rendre la survie de vos héros plus facile. Un refuge bien protégé par exemple vous permet de consacrer moins de temps à sa défense et donc de faire plus d’actions entre les expéditions. Développer la production de ressources vous accorde plus de Points de Troc pour obtenir de l’équipement.

L’auteur a décidé de séparer ce jeu en chapitres. Seul le premier a été publié à l’heure actuelle, mais il contient tout le nécessaire pour une campagne où quelques survivants explorent une terre post cataclysme.

Cet univers, tout comme le suivant, n’a pas encore bénéficié d’une édition imprimée. La maquette est donc moins travaillée et le jeu est seulement disponible en format numérique sur Wargame Vault.

Five Kilometers from Leipzig

Cette règle permet de suivre les péripéties d’un groupe de soldats durant les guerres napoléoniennes, mais pourrait se situer dans tout autre conflit du XIXe siècle.

Cette version est toujours en bêta à l’heure où j’écris ces lignes. Elle est donc moins étoffée que les autres mais donne déjà une bonne idée de la direction prise par l’auteur. Les jeux d’escarmouche couvrant cette période n’étant pas légions, j’ai quand même voulu le mentionner.

Votre petite troupe se retrouvera à affronter des soldats ennemis, des pillards ou des autochtones selon le contexte de la campagne et un peu d’aléatoire. Vos missions s’inscrivent dans le cadre d’une opération militaire plus vaste et pourront inclure de devoir défendre une position, faire fuir l’ennemi, partir en reconnaissance ou capturer un objectif. Parfois une mission débouchera immédiatement sur une autre et vos soldats n’auront pas le temps de se reposer : embuscades, missions de sauvetage, etc. sont au programme.

À partir du 3e tour de campagne, vous aurez la possibilité de partir sur une quête. Un de vos hommes a-t-il découvert une carte menant à une cache de contrebande dans la région, a-t-il rencontré son rival de toujours dans le camp d’en face ? Cette quête servira d’objectif secondaire le temps de la terminer et apportera des bonus bienvenus une fois réussie.

Le système FiveCore

Bien que du même auteur, le système FiveCore n’est pas le même que celui des « 5 from » (on dirait que l’auteur a une fascination pour ce chiffre). Faites donc attention à l’achat !

FiveCore plaira davantage à ceux qui préfèrent un système de combat plus détaillé et moins de chose à faire entre les scénarios. Si « 5 from » est une série suivie avec une forte influence de la campagne sur l’affrontement, alors FiveCore est une série épisodique où chaque émission peut être vue séparément du moment qu’on connaît le contexte général.

Je vous parlerai de FiveCore dans un prochain article.