Warhammer Underworlds: un excellent jeu tactique nerveux au modèle économique rebutant

À mi-chemin entre Warhammer: Age of Sigmar et Magic The Gathering, Warhammer Underworlds est un jeu de figurines tactique et nerveux mélangeant deckbuilding et prise de positions. Souffrant d’un modèle économique poussant à la consommation, cet excellent jeu qui se veut compétitif ne fait pas l’unanimité auprès des joueurs. Mais faut-il tomber dans le piège des achats à tout va ? Ou peut-on apprécier ce jeu en tant que joueur amateur ou peintre occasionnel ? Selon moi, oui. Tour d’horizon et illustration.

Description du jeu Warhammer Underworlds

Dans Warhammer Underworlds, chaque joueur contrôle une bande de guerriers et s’affronte sur un plateau constitué de cases hexagonales. Ces groupes de combattants s’accompagnent de deux decks, l’un contenant des cartes Objectif, l’autre des cartes Pouvoir.

Objectif du jeu

Les joueurs ont trois tours pour marquer le plus de points de gloire. Le vainqueur est celui qui en détient le plus à la fin de la partie.

Les points de gloire peuvent être obtenus de deux manières:

  • Soit en éliminant un guerrier adverse
  • Soit en remplissant les conditions sur une carte d’objectif

Déroulement d’un tour

Un tour se présente comme suit: chaque joueur pioche trois cartes Objectif et cinq cartes Pouvoir. Ils détiennent chacun quatre Pions d’Activation. Ceux-ci sont multi-usages mais servent la plupart du temps à activer un guerrier. Lorsque les joueurs ont dépensé tous leurs pions d’activation, le tour se termine. Entre chaque activation, il est possible de jouer des cartes Pouvoir qui permettent de modifier le cours de la partie via des effets divers.

Les mécaniques notables

Le mélange de jeu de cartes couplé avec des figurines donne un cocktail excitant et prenant ! Pour les habitués du deckbuilding, concevoir un deck avec une dimension spatiale est rafraichissant. Le jeu contient plus d’une trentaine de bandes. De nouvelles sortent chaque année, avec leur lot de cartes, ce qui vous offre un champ de possibilité vaste pour concocter des decks surprenants.

L’autre originalité est le placement flexible des plateaux de jeu au début du tour. Au début de la partie, les joueurs détiennent chacun un plateau de jeu rectangulaire recto/verso. Le premier à poser son plateau choisit la face avec laquelle il veut jouer. Cela représente son territoire. Le second joueur peut choisir la face de son plateau ainsi que l’orientation par rapport à celui de son adversaire (en respectant néanmoins certaines règles). De nombreux agencements sont possibles pour une re-jouabilité toujours plus intéressante !

La critique

Les points positifs

Pour une fois, Games Workshop signe un jeu rapide aux mécaniques de combat simples et efficaces grâce aux dés natifs. Le jeu se transporte facilement, et permet à force d’habitude, d’enchaîner des parties de 45 minutes pleines de surprises. Les bandes sont toutes différentes et ne contiennent pas forcément le même nombre de figurines. Généralement composées de 4 figurines, certaines en contiennent 3, 5 ou 7 ! Vu que chaque joueur n’a droit qu’à quatre activation par tour, celui qui contrôle une bande au-delà de ce nombre devra choisir quels guerriers activer. Grâce à cette mécanique, les bandes au nombre asymétrique de guerriers est rendu possible. Malin !

Warhammer Underworlds se décline en différents formats de jeu. Ceux-ci se différencient les uns des autres sur base du degré de deckbuilding nécessaire pour apprécier le format. En effet, les différents formats de jeu sont déterminés en fonction de la taille de la réserve de cartes dans laquelle les joueurs peuvent puiser pour construire leurs decks. Ainsi, le format Rival vous impose de jouer uniquement avec le deck préconstruit de votre bande. Le format Relic de son côté autorise aux joueurs d’employer n’importe quelles cartes pour concocter le deck le plus efficace (sauf quelques cartes bannies cependant).

Les points négatifs

Une partie des cartes Pouvoir sont injouables en début de partie. Certaines cartes, nommées Amélioration, nécessitent un pion de gloire pour être jouées. Or les joueurs n’en disposent d’aucun au lancement de la partie. Vu que les règles du jeu vous imposent d’incorporer 10 cartes d’amélioration dans votre deck Pouvoir (de 20 cartes), vous vous retrouvez avec un problème gênant. Vous l’aurez deviné, votre main peut-être potentiellement injouable en début de partie. C’est frustrant, surtout quand le premier Point de Gloire tarde à se présenter. Notez que lier un coût à une carte n’est pas neuf. Ce n’est pas une mauvaise mécanique en soi, mais elle a mal été exécutée dans Warhammer Underworlds selon moi. J’aurais proposé un système d’effets supplémentaires en cas de dépense d’un pion de gloire plutôt que de l’imposer en coût pour jouer la carte. Un peu à l’image du mot-clef Kick dans Magic: The Gathering. Cela évite les « mains mortes » et de ralentir inutilement la cadence de ce jeu qui se veut nerveux.

Un autre défaut : Le rapport de forces entre bandes est de base déséquilibré. Certaines volent haut au dessus des autres tandis que que d’autres touchent le fond. C’est un défi pour tous les jeux asymétriques que d’équilibrer les différentes factions. Si vous jouez uniquement en tant qu’amateur, c’est un problème que vous pourrez corriger facilement grâce au deckbuilding (en affaiblissant les bandes fortes et en renforçant les faibles). Dans un cadre compétitif, cette solution n’est pas envisageable malheureusement car vous ne maîtrisez pas le contenu du deck de votre adversaire. Tout le monde se rue sur les meilleures bandes en les équipant des cartes les plus puissantes. Cette course à l’armement est amplifiée avec la sortie soutenue de nouvelles boîtes de base, de bandes et de cartes dans tous les sens.

J’en arrive donc au plus gros défaut du jeu: son modèle économique*. Warhammer Underworlds fonctionne par saison. Chaque année, une nouvelle saison nommée est publiée. La dernière en date s’appelle Gnarlwood. Il est de notoriété publique que sortir de nouvelles extensions tous les six mois est une stratégie mercantile pour pousser les joueurs compétitifs à acheter les nouvelles bandes pour prétendre à des victoires en tournoi. Surtout lorsque l’entreprise utilise ce qu’on appelle du power creep. Il s’agit d’un procédé où le nouveau contenu rend doucement l’ancien contenu de plus en plus faible. Bien connue des habitués de jeux compétitifs, cette technique exaspère au plus haut point les joueurs existants, qui délaisseront le jeu à terme, lassés de voir leurs efforts de deckbuilding et leur investissement réduit à néant. Mais peut-on parler de « défaut du jeu » ? Non, cela ne concerne pas les règles du jeu, ni la qualité du matériel. Ce n’est pas l’équipe créative qui est à remettre en question mais celle qui s’occupe de la stratégie marketing.

Les astuces pour passer un bon moment

Rien ne vous oblige à tomber dans le piège des saisons

Si vous comptez jouer uniquement dans un cadre amical, vous pouvez faire appel aux cartes proxies. Le site Underworldsdb est une base de données avec toutes les cartes du jeu. Il suffit d’imprimer celles qui vous manquent pour rendre vos decks plus performants. Et qui dit cartes proxys, dit aussi figurines proxys. Rien ne vous oblige de jouer avec les figurines officielles. Dans le fond, tout ce qu’il vous faut pour profiter de l’aventure, c’est une boîte de base pour acquérir deux plateaux, le set de dés, les règles et les jetons.

Adaptez le jeu à vos envies

Enfin, si la dimension « jeu de cartes » ne vous plait pas mais qu’Underworlds vous fait de l’œil, rien ne vous oblige de jouer avec le paquet de cartes Pouvoir. Le jeu est totalement jouable sans. Je recommande d’ailleurs cette astuce pour paramétrer la difficulté du jeu, notamment pour les débutants. Cela permet à un nouveau joueur d’assimiler tranquillement les mécaniques de base avant d’en augmenter la complexité.

Pour qui ?

Games Workshop cible deux types de joueurs avec ce jeu:

  • les joueurs de jeux de sociétés, avec comme objectif de les attirer vers les jeux de figurines et de leur présenter la licence Warhammer. GW espère ensuite leur faire sauter le pas vers Warcry , ou de suite vers Warhammer Age of Sigmar.
  • les joueurs de jeux de cartes de stratégie, genre Magic The Gathering, qui sont friands de deckbuilding et de compétition.

Fiche technique

Joueurs2 (voir 3 ou 4 si vous avez d’autres boîtes de base)
Durée>45 min.
TypeCompétitif
ComplexitéParamétrable, oscillant de moyenne à haute